flavio a écrit:Un point me fait réagir :
Ce n'est pas l'âge du pays qui fait la culture mais des choix politiques. On étudie en France les civilisations antiques dont la plupart n'ont que de vagues liens de parentés avec nous... bien moins qu'entre les "États-Uniens" et nous. Et par parenté, j'entends aussi bien sur le plan biologique que culturel.
D'après moi, tu commets l'erreur habituelle de considérer que les habitants (Blancs surtout) des États Unis sont nos "parents", sur le plan culturel, celui qui m'importe.
C'est largement inexact, en plus de l'absence d'histoire ancienne de ce pays, argument que je maintiens.
- Il s'est constitué
contre l'Europe en général, l'Angleterre plus particulièrement (en partie, on peut tout à fait être d'accord !)
- Les États-unis se sont constitués sur la base de la Bible et tout particulièrement sur la notion de
contrat, comme celui qui unissait Yahvé au peuple élu. Les Pères fondateurs lisaient la Bible dans le texte, non en traduction.
Le droit américain actuel est basé sur le contrat : tout est dans le contrat, rien en dehors du contrat. Notre système juridique, basé sur le droit romain et appelé plutôt "système romano-germanique", est tout différent de ma "common law" de type anglais.
Par exemple imposé, il faut lire ce qui tient lieu de contrat entre la société Microsoft et celui qui achète un ordinateur muni de leur logiciel système. On ne peut prendre connaissance de ce contrat (E.U.L.A. ou C.L.U.F.) qu'après l'avoir accepté... implicitement, lors de la rupture du sceau. Ensuite c'est une phraséologie extraordinaire, où l'acheteur a toutes les obligations, Microsoft aucune, et le constructeur de l'ordinateur beaucoup, en tant que subrogé de Microsoft.
J'avais lu il y a longtemps un livre de sociologie :
Philippe d'Iribarne, La logique de l’honneur, Seuil 1989 (ISBN 2020207842)
http://www.cnam.fr/lipsor/dso/articles/ ... arne2.html
Je viens de parcourir rapidement ce long résumé, où je retrouve les différences
fondamentales de comportements sociaux et professionnels en France, aux États-Unis et en Hollande, pour trois usines de la même grande société internationale [jamais citée : Péchiney ?]
Ces différences sont étonnantes. Encore maintenant, pour un livre lu il y a bien longtemps.
- Notre culture indo-européenne est basée sur la confiance, sur la bonne foi, comme l'a établi Emile Benveniste (*). C'était le nom de l'un des dieux du Capitole romain,
Bona fides, aux côtés de Jupiter.
Nous n'ignorons pas bien sûr la notion de contrat, mais dans notre culture, il est subordonné à la bonne foi, il n'a pas besoin d'être écrit, il est de troisième fonction suivant Dumézil, alors qu'aux États-Unis, le contrat tend vers le sacré, administré par un million de "lawyers" (à peu près "avocats").
[(*) Émile Benveniste, Le Vocabulaire des institutions indo-européennes 1 et 2, 1969, Paris, éd. de Minuit.
Tome 2. Pouvoir, droit, religion.
Dans cet ouvrage, la méthode linguistique comparative est employée à un dessein d'ensemble : l'analyse du vocabulaire propre aux grandes institutions dans les principales langues indo-européennes. Partant des correspondances entre les formes historiques, on cherche, au-delà des désignations, qui sont souvent très divergentes, à atteindre le niveau profond des significations qui les fondent, pour retrouver la notion première de l'institution comme structure latente, enfouie dans la préhistoire linguistique. On jette ainsi une lumière nouvelle sur les fondements de maintes institutions du monde moderne, dans l'économie, la société, le droit, la religion. Pour Benveniste, religio n'est pas "relier", mais plutôt "récollecter"]
- "La métapolitique est le domaine des valeurs qui ne relèvent pas du politique, au sens traditionnel de ce terme, mais qui ont une incidence directe sur la constance ou l'absence du consensus social régi par le politique".
Les choix culturels sont peut-être "de la" politique (et de l'argent), mais ce sont aussi des choix fondamentaux, des choix "du" politique. Or ces politiques (les seconds évoqués) ont eux-mêmes été formés culturellement par des décisions prises dans la culture et le politique de leur époque, et souvent bien avant.
J'abrège la démonstration, pour dire que la métapolitique précède évidemment et nécessairement le (ou la) politique, donc la culture précède !
On peut l'infléchir, certes, et ça dure depuis les indo-européens, malgré la christianisation et autres bouleversements culturels --et politiques.
Nous ne sommes pas des Chinois ou des Japonais, sur le plan culturel. Ni des Américains. Mais peut-être le deviendrons-nous enfin par colonisation culturelle ?
Pour terminer (ouf pour vous !) ce n'est pas sans bonnes raisons que Joanne Rowling a
exigé que les films soient tournés avec des acteurs britanniques et (il me semble) dans les Îles britanniques.
Il semble qu'elle a négocié de façon très serrée ses contrats, en souvenir de l'époque où elle était pauvre et à vécu avec les Détraqueurs...